La France a officiellement ouvert jeudi ses archives judiciaires et policières sur la guerre d’Algérie (1954-1966). Ces documents devraient dire une part de vérité sur un pan confligène de l’histoire des deux pays.
L’Etat français a publié, le jeudi 23 décembre au Journal officiel, un arrêté interministériel donnant l’accès aux archives judiciaires et policières sur la guerre d’Algérie (1954-1966). Le ministère de la Culture précise que cette ouverture concerne « les documents relatifs aux affaires portées devant les juridictions et à l’exécution des décisions de justice ». Mais également s’étend aux « documents relatifs aux enquêtes réalisées par les services de la police judiciaire ».
Ces archives se trouvent aux Archives nationales, dans les services départementaux d’archives, dans le service des archives de la préfecture de police et dans les services d’archives du ministère des armées. On peut aussi les consulter aux Archives nationales d’outre-mer et à la direction des archives du ministère de l’Europe et des affaires étrangères.
Pour faciliter le travail des historiens
La France rend accessible ces documents quinze ans avant la date prescrite par la loi. En effet, le calendrier légal veut qu’on ne donne le droit au grand public de les consulter qu’après 75 ans passés sous le sceau du secret. Sauf bien sûr en cas de dérogation individuelle obtenue par des chercheurs dans le cadre de leurs travaux. Selon des spécialistes, ces dérogations représentaient un frein à la recherche. Il fallait généralement attendre plusieurs mois, voire un an, pour obtenir une réponse, souvent négative. L’arrêté de jeudi facilitera le travail des historiens dans la recherche de la vérité.
Cette déclassification des archives sur la guerre d’Algérie rétablit une double justice puisque d’autres conflits français ont déjà bénéficié de cette procédure, et souvent bien plutôt. On pense notamment à la Seconde guerre mondiale, à l’Occupation et à l’Empire colonial après-guerre. Sans oublier le génocide des Tutsi au Rwanda, en 1994. Les gouvernements français successifs ont travaillé à lever un coin de voile plutôt que prévu.
« On a des choses à reconstruire avec l’Algérie »
Dès son accession au pouvoir, Emmanuel Macron avait également promis d’aider les historiens à éclairer les zones d’ombre de la guerre d’Algérie. Cette politique de réconciliation des mémoires a débuté en septembre 2018 avec la reconnaissance de l’implication de l’armée française dans la disparition du mathématicien et militant communiste Maurice Audin, en 1957 à Alger. En mars 2021, le président français avait aussi pris l’engagement de simplifier la procédure pour accéder par dérogation aux archives classifiées vieux de plus de 50 ans.
« On a des choses à reconstruire avec l’Algérie. Elles ne pourront se reconstruire que sur la vérité », avait expliqué Roselyne Bachelot, le vendredi 10 décembre dernier. Selon la ministre française de la Culture,« on ne doit jamais avoir peur de la vérité ». Mais cette vérité pourrait ne pas s’offrir entièrement. En effet, l’arrêté de jeudi donnera seulement accès à une minorité de documents déjà consultés par certains chercheurs. Donc il ne faudrait pas s’attendre à des révélations fracassantes.
Alger rendra-t-il la pareille ?
La décision de Paris intervient après plusieurs semaines de rupture diplomatique avec Alger. On y voit donc une action en faveur de la réconciliation entre les deux pays. On considère aussi que c’est un geste politique d’Emmanuel Macron à quelques mois de la présidentielle française. Une thèse que rejette son chef de la Diplomatie, Jean-Yves Le Drian. Quoiqu’il en soit, la France prouve une certaine bonne foi vis-à-vis de l’Algérie. Certains Français aimeraient donc qu’Alger lui renvoie l’ascenseur en donnant accès à certaines de ses archives comme celles sur l’assassinat des sept moines de Tibhirine.
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