Les assureurs prêts à tout pour convaincre

En perte de vitesse depuis quelques années, face aux bancassurances notamment, et souffrant d’une image dégradée en raison de leurs prises de position durant la pandémie, les assureurs se sont mis en ordre de bataille pour reconquérir le cœur – et le portefeuille – des Français. Et tous les moyens sont bons.

Les assureurs à l’assaut des emprunteurs

Les assureurs sont partis d’un constat simple : malgré 3 lois en leur faveur sur le sujet – les lois Lagarde de 2010, Hamon de 2014 et Bourquin de 2018 -, en 2019, 85 % du marché de l’assurance emprunteur restait dans l’escarcelle des banques.

Avec des bénéfices à en faire saliver plus d’un : les 6 millions de Français emprunteurs génèrent chaque année environ 6 milliards d’euros de cotisations d’assurance, avec des marges brutes de plus de 60 %, soit le double de celles constatées dans l’assurance auto. Les assureurs, en manque de rentabilité, ont donc milité pour que soit introduite dans la loi la possibilité de résiliation « à tout moment » de l’assurance emprunteur. Seul et unique moyen pour eux de venir concurrencer les banques sur ce terrain.

Tout en se gardant bien de communiquer sur les risques d’une telle évolution pour les emprunteurs. « Une assurance emprunteur n’est pas un abonnement téléphonique, ni même une assurance habitation », rappelait ainsi la Ministre Agnès Pannier-Runacher, en octobre 2020, à l’occasion des débats devant la représentation nationale. Et celle-ci de pointer du doigt les risques associés : « les personnes les plus vulnérables paieraient plus, tandis que les personnes en bonne santé qui ont la vie devant elles et ont un bon emploi paieraient moins ».

Qu’à cela ne tienne, les assureurs n’ont rien lâché : ne lésinant pas sur le lobbying parlementaire – la fédération française de l’assurance a ainsi dépensé plus de 2 millions d’euros sur deux ans quand la Macif, à elle seule, a doublé le budget qu’elle alloue à cette activité entre 2019 et 2020 – ni sur les opérations publicitaires dans les médias. En témoigne l’article intitulé “La libéralisation du marché de l’assurance emprunteur immobilier est plus que jamais nécessaire”, publié sur BFM le 1er février, en partenariat avec l’agence de marketing digital Scribeo, vraisemblablement pour le compte de Securimut, une filiale de la Macif. Efforts payants : début février 2022, après quelques rebondissements, la clause si chère aux assureurs a finalement été adoptée. Celle-ci entrera en vigueur en juin prochain pour les nouveaux emprunteurs puis en septembre pour les autres.

Image en berne

Si les assureurs ont réussi à convaincre les parlementaires du bien-fondé de leurs demandes, en mettant notamment en avant les bénéfices possibles pour les consommateurs, pas sûr que ces derniers soient dupes. À l’inverse des bancassureurs, salués pour leur solidarité, la pandémie de COVID-19 a entaché durablement la réputation des assureurs français, au premier rang desquels Axa.

En cause, entre autres, leur refus de prendre en charge les pertes d’exploitation des restaurateurs ou encore d’accorder des remises à leurs assurés auto, bien que, pour beaucoup, leurs véhicules soient restés au garage pendant plusieurs mois en raison des confinements à répétition. Autant de prises de position qui ont laissé des traces.

C’est bien simple, d’après un sondage réalisé par L’Argus de l’assurance en partenariat avec Sopra Steria, en 2021, 16 % des Français déclaraient avoir une moins bonne image de leur assureur qu’avant la pandémie. Un autre sondage, réalisé quant à lui en 2020 au lendemain des premiers confinements, auprès des utilisateurs du comparateur d’assurances en ligne Assurland.com, indiquait qu’une « majorité de Français » estimait que « les assureurs n’avaient pas rempli leur rôle durant le Covid-19 ».

Bien que désormais facile, les emprunteurs français pourraient dès lors réfléchir à deux fois avant de résilier leur contrat d’assurance. D’autant que, comme à chaque libéralisation de marché, les prix attractifs proposés par les nouveaux entrants peuvent s’expliquer par une moins bonne qualité des prestations proposées, quand ils ne durent pas qu’un temps… Comme viennent de s’en apercevoir, à leurs dépens, bon nombre de consommateurs français, de plus en plus nombreux à revenir chez l’énergéticien historique EDF, après avoir déchanté chez la concurrence.

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